Les médiateurs dans la crise à l’est de la République démocratique du Congo reçoivent un renfort de taille, en la personne du président togolais, Faure Gnassingbé.
Le président du Togo, Faure Gnassingbé, est chargé de mener la médiation de l’Union Africaine pour résoudre la crise à l’est de la République démocratique du Congo où les rebelles de l’Alliance du Fleuve Congo et du M23, et les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) s’affrontent. Le président togolais succède à João Lourenço, président de l’Angola, démissionnaire. Pour nombre d’observateurs, Faure Gnassingbé prend les rênes d’une mission difficile, dans une région des Grands Lacs, marquée par des décennies de conflits et des tentatives de paix infructueuses.
Le rôle du médiateur de l’UA est déterminant pour calmer les tensions et ouvrir la voie à un avenir plus stable, observent les spécialistes de la région des Grands Lacs. Faure Gnassingbé a-t-il le profil pour cette mission ? Certainement oui, car il a montré ses preuves dans d’autres crises. En effet, lorsque la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest – CEDEAO engage le bras de fer avec le Mali, le Burkina et le Niger suite aux coups d’Etat perpétrés par des officiers militaires, le président Gnassingbé a été le seul qui a refusé d’appliquer les mesures de sanctions prises par la CEDEO contre les auteurs des putschs. Aussi a-t-il entrepris des démarches pour que la CEDEAO lève ses sanctions. Même si malgré tout, les trois pays ont fini par quitter l’organisation sous régionale. Tous ceux qui s’activent pour ramener la paix dans l’Est de la RDC reçoivent un renfort de qualité. C’est un homme discret, un redoutable négociateur.
Même s’il a réussi à rapprocher des positions ailleurs, le dossier congolais étant complexe, peut-il réussir ?
Si l’Union Africaine lui confie cette mission, c’est parce que Faure Gnassingbé a fait ses preuves. S’il a accepté la mission, c’est parce qu’il croit qu’il peut apporter sa touche personnelle. Le grand défi pour lui dans ce dossier congolais, c’est, effectivement sa complexité qui ne date pas d’aujourd’hui. Alors qu’il entame sa tournée, à Kinshasa, les autorités ont ordonné une perquisition des domiciles de l’ancien président de la République, Joseph Kabila Kabangué, accusé d’être un soutien de l’AFC/M23. Dans ces conditions où tous les efforts seront chaque fois remis à plat par la posture du gouvernement, réussira-t-il à obtenir des résultats ? L’interrogation est permise.
Outre la posture un peu radicale du président Tshisekedi qui veut en finir avec cette instabilité à l’est de son pays qui a trop duré, l’autre défi c’est le nombre de médiateurs. Faure Gnassingbé, médiateur de l’Union Africaine, n’est pas le seul médiateur dans ce dossier. L’hebdomadaire Jeune Afrique s’interroge à juste titre : trop de médiateurs ne tue-t-ils la médiation ? Une question pertinente à notre goût car il y a, en effet, beaucoup trop de monde dans cette crise : médiateurs de la SADC, de l’Afrique de l’Est de l’UA, etc. Chacun arrive avec son plan de paix. Regardent-ils tous dans la même direction ? Certains analystes sont plutôt sceptiques. Un scepticisme que nous partageons, d’ailleurs. Au regard de la trajectoire politique de la RDC, depuis fort longtemps, aucune médiation n’a véritablement réussi à ramener la paix dans cette partie est du Congo, riche en ressources minières.
Les adeptes de la théorie du complot font observer, à tort ou à raison, que depuis toujours, tous ces médiateurs internationaux ont régulièrement échoué, l’un après l’autre, parce que tous ceux qui s’activent dans ce dossier ne sont pas, nécessairement, tous pour un retour de la paix et pour bien des raisons. Une paix durable n’arrangerait pas les forces occultes qui, pendant que les milices ou rebelles terrorisent les populations, sont tapies dans l’ombre et pillent les richesses minières. Mais c’est un autre débat. Pour finir, souhaitons que la mission du médiateur de l’Union Africaine, M. Faure Gnassingbé soit une réussite afin que les populations puissent regagner leurs maisons.
Pierre Boubane
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