Le dimanche 23 mars 2025, le général soudanais, Yasser al-Atta, présenté comme le numéro 2 du régime de Khartoum, à travers une déclaration aux médias, menace d’attaquer les aéroports de N’Djaména et d’Amdjarass. Depuis, ces propos continuent de susciter une avalanche de condamnations à travers le Tchad.

Le gouvernement tchadien, à travers le ministère des Affaires étrangères, a condamné fermement dans un communiqué de presse, la déclaration de l’officier soudanais. Sur les réseaux sociaux les réactions des citoyens s’enchaînent. Les partis politiques ne sont pas restés muets. Le Mouvement Patriotique du Salut (MPS), parti au pouvoir, condamne à son tour fermement, les menaces verbales de l’officier soudanais et appelle le peuple tchadien à l’union sacrée.

Cet appel à l’unité lancé par le MPS n’a pas encore eu un écho escompté. Une bonne partie de la classe politique tchadienne garde encore le silence. Est-ce une question de prudence ? Sans doute. L’honnêteté intellectuelle nous commande de préciser que c’est un officier militaire qui s’est exprimé, et non le gouvernement soudanais. Du coup, des leaders de l’opposition préfèrent observer le silence, sans doute méditant cette maxime : il est important de savoir garder le sang froid en toute circonstance. Même si une partie de l’opinion à N’Djaména a perçue la menace de l’officier soudanais comme une déclaration de guerre.

En rappel, en novembre 2024, les autorités soudanaises ont accusé le Tchad de fournir des aides aux Forces de Soutien Rapide (FSR) pour commettre des exactions au Soudan : « tueries, viols, déplacement forcé des populations, crimes de guerres et crimes contre l’humanité ». C’était à travers un communiqué publié le samedi 2 novembre 2024. Ce communiqué annonçait le dépôt d’une plainte officielle par le gouvernement soudanais contre le Tchad devant la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples. Cette même source précisait que la plainte visait le pouvoir tchadien qui aurait joué « un rôle essentiel dans les crimes commis par la milice rebelle (FSR) ». Mais N’Djaména avait rejeté catégoriquement cette accusation. « Le Tchad n’intervient pas au Soudan, sauf en tant que médiateur afin de ramener la paix », avait réagi le gouvernement tchadien dans un communiqué. Toutefois, les officiels soudanais ne sont pas convaincus de la neutralité du Tchad.

D’une manière ou d’une autre, la guerre que se livrent les deux généraux soudanais, le président Al-Buharan et le chef de FSR Hemeti au Soudan voisin, a des répercussions au Tchad. Le Tchad est contraint d’accueillir les réfugiés soudanais au nom de la solidarité humaine. Mais sa neutralité est questionnée par l’un des belligérants. Ainsi, de la menace de poursuite judiciaire devant des tribunaux internationaux, le Tchad est, aujourd’hui menacé par un général d’attaque sur le plan militaire. Une menace que les autorités tchadiennes prennent aux sérieux. Il est donc plus qu’urgent que l’ONU, les États-Unis, la ligue arabe, l’Union Africaine interpellent les deux généraux soudanais à privilégier le dialogue avant que leur bagarre ne déborde les frontières.

Pierre Boubane