Le Tchad s’efforce depuis 2000 dans le contexte du changement du paradigme de l’aide internationale, à posséder un référentiel de développement, mobilisateur des acteurs et des moyens. L’efficacité théorique accordé à cet exercice en termes de résultats socio-économiques est remise en causes par la dégradation du développement humain que connait le Tchad. A 5 ans de 2030, date butoir de l’évaluation des 17 Objectifs du Développement Durable, le Tchad pourrait mieux faire en tirant les leçons des erreurs de sa planification de développement.

Le Tchad est un long fleuve de conflits armées et d’instabilité politique qui a amorcé une sorte de transition non consolidée de 1990 à 2000. Comme tous les pays en développement, il cherche les voies du progrès. Son entrée dans le cercle fermé des pays producteurs et exportateurs de pétrole a coïncidé avec la nouvelle logique internationale de l’industrie du développement : mettre en avant les Etats qui doivent avoir un cadre de développement capable de catalyser les contributions des partenaires. Pendant 8 ans, la première planification de développement n’aura pas été volontariste.

2003-2011. Le premier document de développement élaboré avec l’aide des partenaires est la Stratégie Nationale de Réduction de la Pauvreté volet 1 (SNRP 1) de 2003 à 2006. Il est né de l’éligibilité du Tchad au programme d’allègement de la dette mis en place par les institutions de Bretton-woods et qui devait lui permettre de faire une économie additionnelle de 260 millions de dollars à l’horizon 2015. La SNRP 1 sera suivi d’un 2ème segment entre 2008 et 2011. L’un des objectifs phares des deux documents sont la sécurité alimentaire et la lutte contre la pauvreté. Le manque d’appropriation d’une part, et la mauvaise gestion des ressources financières engrangées d’autre part, ont compris tout progrès. Le Tchad en régression dans la notation internationale en matière de développement économique et social. Malgré une croissance moyenne de 13% entre 2004 et 2014 à laquelle s’ajoute les ressources additionnelles issues de l’allègement de la dette.

2013-2015. Le Plan National de Développement (PND), premier document de développement volontariste est élaboré de manière participative pour la période de 2013 à 2015. Une planification sur 2 années dans le but de s’inscrire dans l’agenda des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD). Pays à 80% rural, le PND sera appuyé par documents sectoriels. Malheureusement, le Tchad est tombé dans une crise économique due au à la chute brutale du prix de pétrole qui constitue sa source principale d’exportation. Plongeant à nouveau sous le poids de la dette, tous les grands travaux prévus dans le PND sont aux arrêts. Le Tchad est devenu victime de la gestion budgétaire imprévisible. Le surplus budgétaire des années fastes n’a pas été épargné ni sous forme de fonds de stabilisation ni sous forme de fonds de développement. Cet épisode va aboutir à la coupe des salaires et des indemnités en 2016 connue sous l’appellation des 16 mesures.

2017-2021. Deux ans après le lancement de l’agenda 2030 des Nations Unies concernant les Objectifs du Développement Durable, le Tchad a changé de stratégie en adoptant le Plan National de Développement sur le long terme à mettre en œuvre par plusieurs plans intérimaires de 5 ans. Ce qui a justifié un premier plan intérimaire de 2017 à 2021. La mobilisation des partenaires est mitigée à cause de l’incertitude sur les risques et rendements des secteurs à valoriser, en l’absence des études de faisabilité préalable. Le plus difficile est la crise de COVID 19. Les nouveaux projets de développement sont à nouveau aux arrêts. La corruption et les détournements de fonds publics se poursuivent. L’aide du FMI et le rééchelonnement de la dette par Glencore n’a pas abouti à la reprise des actions publiques en faveur du développement.  

2021-2024. C’est une période de vide en planification du développement à cause de la transition politique à la suite du changement constitutionnel en avril 2021. La grosse part des budgets de la transition ont été orientés vers les activités de dialogue et de retour à l’ordre constitutionnel. Les politiques sectorielles des ministères deviennent conjoncturels. Les élections locales et législatives du 29 décembre 2024 viennent de marquer la fin de cette transition.

Le Plan National de Développement à l’horizon 2030, élaboré en 2017 et intitulé “Le Tchad que nous voulons” demeure toujours en vigueur. Il reste 5 années pour son expiration. Alors que le Tchad demeure toujours un Pays Moins avancé, un pays non insulaire et enclavé, un pays fragile, les nouvelles autorités doivent mesurer l’urgence du développement. Il faut pour cela une dose croisée du volontarisme politique, de la planification rigoureuse, de la gestion rationnelle des ressources, de la gestion prospective des risques et d’une culture politique de la réédition de comptes.